RESISTANCES / A154 Un désastre écologique et financier
Par Anthony Brondel- Le Journal de l'insoumission n°1795 avril 2025
Au milieu de la Beauce, dans le « Grenier de la France », le projet d’autoroute A154, vieux de plus de 30 ans, prévoit la création de 61 kilomètres de nouvelles sections et l’élargissement de 37 kilomètres de routes nationales existantes, menaçant ainsi plus de 750 hectares.
La N154, cruciale pour les habitants en l’absence d’alternatives ferroviaires, relie les deux villes les plus importantes d’Eure-et-Loir. Sa privatisation en autoroute payante qui comprend la construction de trois viaducs, entraînerait l’artificialisation de 660 hectares de terres agricoles et 90 hectares de forêt. Il s’agit du projet routier qui dévorerait le plus de terres agricoles.
Il s’agit d’un projet obsolète et déconnecté des enjeux environnementaux, qui s’oppose aux objectifs que la France s’est fixés en matière d’artificialisation. Alors que la préservation des sols est essentielle pour garantir notre souveraineté alimentaire et protéger les écosystèmes, la destruction de ces terres agricoles et forestières apparaît comme une aberration.
Aux antipodes des enjeux de réduction de gaz à effet de serre, la Déclaration d’Utilité Publique (DUP) chiffre les émissions de CO2 du projet à plus de 350 000 tonnes. Quant au coût financier, il est estimé à 1,080 milliard d’euros.
Les agglomérations de Chartres, de Dreux et le département d’Eure-et-Loir achètent depuis plusieurs années des terres agricoles, parfois éloignées du tracé prévu de l’autoroute, pour faciliter les négociations foncières. Cette stratégie soulève des questions sur les véritables intentions des promoteurs du projet.
Le coût du péage pour les automobilistes entre Dreux et Chartres, initialement fixé en 2015 à 6 € a déjà augmenté en 2024 à 7,52 € pour 37 km, et pourrait continuer à croître.
Une enquête publique réalisée en 2016 a révélé que 70 % des 2 000 personnes interrogées s’opposent à ce projet.
Le collectif La Déroute des Routes, soutenu par plus de 12 800 signataires d’une pétition, n’exclut pas la création d’une zone à défendre (ZAD). En mai 2022, le CESER (Conseil économique social environnemental) du Centre-Val de Loire, saisi par une pétition citoyenne, a adopté une contribution critique du projet : les études ne seraient pas à jour sur les besoins auxquels l’A154 devrait répondre en 2030, et le projet aurait été décidé sans en évaluer toutes les conséquences. Les opposants dénoncent une avancée sans analyse sérieuse des impacts et des alternatives possibles.
Plutôt que de détruire des terres et des forêts pour enrichir les sociétés concessionnaires, les opposants appellent à investir dans un modèle de transport respectueux de l’environnement et véritablement bénéfique pour les citoyens.
Il y aurait au total plus de 50 projets routiers et autoroutiers contestés partout en France selon le collectif La Déroute des Routes, pour un coût total des projets estimé à 26 milliards d’euros. Le plus connu l’A69 est toujours en cours. Si L’autorisation du projet a été annulée par le tribunal administratif de Toulouse le 27 février dernier, « faute de nécessité impérieuse » le gouvernement a annoncé le 7 mars avoir demandé un sursis à exécution, pour permettre au chantier de reprendre, dans l’attente de la procédure d’appel.