ÉDITO : Quand le sage désigne la lune, l’imbécile regarde le doigt
par Séverine Véziès - Le Journal de l'insoumission n°1797 JUIN 2025
La meute réactionnaire s’active. Tout est prétexte pour ses apôtres qui se répandent sur les plateaux télé. La tenue des femmes, la nouvelle chasse aux sorcières contre nos compatriotes musulmans, le recul sans précédent sur des avancées écologiques majeures …
L’espace médiatique est ainsi saturé par des sujets qui empêchent de penser rationnellement les choses ou qui sont traités d’une façon qui permette de détourner du regard les vrais enjeux de notre temps.
Prenons l’exemple récent de la loi Duplomb. Les macronistes, la droite extrémisée et l’extrême droite se sont alliés pour empêcher tout débat à l’Assemblée nationale avec le vote d’une motion de rejet. Leurs éléments de langage alimentent le fantasme selon lequel le problème des agriculteurs serait les normes qui encadrent leur activité. Le titre de cette proposition de loi est révélateur du parti pris choisi : loi « visant à lever les contraintes à l’exercice du métier d’agriculteur ». En ligne de mire, l’usage des pesticides (notamment les néonicotinoïdes) et l’indépendance de l’organe de contrôle (Agence nationale de sécurité sanitaire de l’alimentation, de l’environnement et du travail, l’ANSES). Mais que sont ces normes, sinon des mesures de santé publique et de protection de notre écosystème. De nombreuses études (et notamment le rapport de l’INSERM de 2021) démontrent le lien entre divers cancers et autres maladies (Parkinson, bronchites chroniques…) et l’usage des pesticides pour les consommateurs, les riverains (notamment l’exposition prénatale de l’enfant), et l’agriculteur lui-même. Le 5 mai dernier, 1279 médecins, chercheurs, et scientifiques alertaient dans une lettre ouverte le gouvernement français sur les dangers de ce texte.
Ce discours anti-norme est celui de la FNSEA et donc des lobbies de l’agrobusiness. L’objectif de cette proposition de loi est simple, faire primer l’intérêt économique et donc un modèle agricole productiviste et industriel sur les enjeux sanitaires et environnementaux. Mais cette prise de recul, vous ne l’entendrez pas dans la bouche des journalistes militants et autres consultants aux ordres qui défilent sur les plateaux bollorisés. Vous n’entendrez pas non plus parler des véritables enjeux : permettre aux agriculteurs de vivre dignement de leur travail et donc limiter les marges de l’agrobusiness.
Cette saturation de l’espace médiatique et politique par ces manipulations d’opinion est générale. C’est d’ailleurs la stratégie de l’extrême droite que de s’appuyer sur des faits divers pour alimenter leurs thèses haineuses et de division des Français·es, tout en préservant les intérêts des milliardaires et firmes multinationales. Mais ils ne sont pas les seuls à le faire.
Le fameux rapport sur les frères musulmans présenté en conseil de défense dont les conclusions sont grandiosées par le service après-vente médiatique révèle la stratégie électoraliste dangereuse des macronistes qui diffuse les thèses de l’extrême droite dans le champ politique et alimente l’islamophobie dans le pays. Pendant ce temps des nervis néonazis défilent dans les rues de Paris, insultent, menacent, attaquent et violentent à tout va. à droite, la recomposition politique est en route. Entre Retailleau et Attal c’est la course à l’échalotte du plus extrémiste pour déterminer celui qui prendra la tête du bloc bourgeois et fera la jointure avec l’extrême droite.
Pendant ce temps, les attaques ne faiblissent pas à l’encontre de la France insoumise, principale et véritable force d’opposition dans le pays. Fake news, ragots, caricatures, mensonges, la vérité n’est plus la règle dans les débats ou interviews. La trumpisation ambiante est incroyable.
Face à cela, il nous faut continuer à porter nos positions sans faiblir face aux coups de force et de pression de la bonne société bourgeoise qui voit ses intérêts menacés. Continuer la bataille de convictions, c’est le jeu même de la démocratie.
La France insoumise peut être fière d’avoir tenu bon face aux torrents de boue des soutiens inconditionnels d’Israël. Face au carnage qui se déroule à Gaza et à ce génocide, petit à petit les un·es et les autres n’ont pas d’autre choix que de nous donner raison.