France

L'intersyndicale de General Electric s’est rendue le jeudi 27 juin à 14h au tribunal de grande instance de Belfort. Il s'agissait d’un référé visant à faire annuler le plan social annoncé par l’acquéreur de la production des turbines à gaz d'Alstom. Quelques jours plutôt, le 22 juin dernier, un grand rassemblement avait eu lieu à Belfort.

Quelque 5000 personnes étaient donc réunies à Belfort, place de la Résistance devant la Maison du Peuple, pour réclamer l’abandon du projet de restructuration. Un large spectre politique côtoyait syndicats, salarié.e.s, habitant.e.s et Gilets jaunes. Ce plan social menace pas moins de 1000 emplois.
Mais revenons sur la genèse de cette histoire.
En 2016, le ministre de l'Economie, Emmanuel Macron, devenu président de la République française depuis, signe un accord avec General Electric portant rachat d’Alstom en échange de créations de postes. Nous voici en 2019 et non seulement les postes n'ont pas été créés, mais en sus, le même nombre va être supprimé !

Le contrat n'est d'autant pas honoré que l'accord promettait de développer l'industrie à Belfort, en tant que centre européen des turbines à gaz de 50 hertz. L'accord stipule en effet, que les équipements doivent rester sur place durant dix années. Les USA auraient joué un rôle dans cette histoire. "Quand Donald Trump a repoussé Alstom il y a mis tous les moyens. Alors mettons tous les moyens pour repousser le projet de General Electric", exhortait une intervenante lors de la deuxième série de prises de parole dans l'après-midi. L'intersyndicale et ses soutiens souhaitent qu'un nouveau projet, viable, qui garantisse la pérennité des turbines à gaz à Belfort, soit mis en place.

Le Député Jean-Luc Mélenchon, qui alerte depuis bien longtemps sur la nécessité de soutenir Alstom, ce fleuron de notre industrie, tenait à marcher auprès des salarié.e.s. La lutte d’Alstom est en effet symptomatique de la destruction du tissu industriel français. Avec lui, la députée européenne insoumise Anne-Sophie Pelletier issue du cru franc-comtois accompagnée d’Emmanuel Maurel. Au programme de Jean-Luc Mélenchon : conférence de presse le matin, avant de s'immerger dans la foule. La conseillère régionale insoumise Rhône-Alpes, Emilie Marche, s'est exprimée mettant en valeur la classe ouvrière tout en fustigeant la distance qu'Emmanuel Macron entretient avec cette frange de la population. "Macron et ses amis ne savent pas ce qu'est un ouvrier qualifié, qui a une intelligence technique", a-t-elle insisté à l'adresse des salarié.e.s présent.e.s. Elle a profité de l'occasion pour inviter les gens à soutenir les autres sites.

Etaient présents en nombre également, des gilets jaunes venus de toute la région, dont une délégation de soixante-sept personnes qui avaient fait le déplacement en bus depuis Besançon.
Jean-Luc Mélenchon, interpellé par des gilets jaunes, ravis de le voir revêtir la chasuble jaune qu’on venait de lui offrir, a rappelé son soutien au mouvement, Adrien Quatennens, interrogé le 24 juin dans la matinale d'europe1, a rebondi sur le geste du député de Marseille : "Certes les Gilets Jaunes n'ont pas voté en masse pour nous aux élections européennes. Mais ce n'est pas une raison pour nous de lâcher leur mouvement. Le fait de continuer à le soutenir prouve que nous ne cherchons pas à le récupérer".

Dans ces journées de résistance, il est bon de se souvenir que la cité industrielle de Belfort s’est construite dans la lutte. Les Belfortains ont tenu, il y a 140 ans face à l'envahisseur allemand. "Aujourd'hui l'envahisseur ne vient plus avec des armes, la guerre est économique", a tancé un intervenant syndicaliste au micro. Si la lutte à Belfort catalyse toutes les attentions en cette fin du mois de juin, c’est parce qu’elle est un exemple parmi d’autres de la dilapidation qui est faite de notre savoir-faire industriel. Grenoble a vu de son côté partir ses turbines hydrauliques, lesquelles étaient utilisées dans des barrages partout dans le monde. C'est une expérience de cent ans qui s'en est allée.

La fameuse turbine à gaz que défend Belfort permet, quant à elle, de produire de l'électricité. Une branche indispensable pour les énergies renouvelables. Dans l'éolien et le photovoltaïque par exemple. "Lorsqu'il n'y a pas de vent, ou pas de soleil, on allume et éteint la turbine à gaz en cinq minutes", précisait un syndicaliste devant la foule réceptive.

Et il y a bien sûr les postes à défendre. Mais les initiateurs de la manifestation attendent des engagements écrits, en termes d'investissements et de création d'emplois. Maintenir les turbines à gaz sur le secteur belfortain doit servir de tremplin pour dynamiser des filières d'avenir comme l'hydrogène, le grand carénage ou encore l'aviation. L'activité du département dépend en grande partie du savoir-faire des salarié.e.s de cette branche. "S'il n'y a plus de turbines, les trains qui les transportent ne servent plus à rien", déplore un cheminot à la retraite que nous avons interrogé. Pour lui, la manifestation du 22 juin résonnait comme une revanche. "Lors de la longue grève SNCF de l'an dernier nous avions été assez peu soutenus, et le gouvernement n'a rien voulu entendre". La mobilisation autour de Général Electric marquera peut-être une prise de conscience...

Au début de l'attroupement sur la place de la Résistance, 20 ans de politiques destructrices ont été rappelées au microphone... 20 ans de politiques destructrices de l'industrie française en général et à Belfort en particulier. Plus globalement, l'appel à manifester répondait au besoin de juguler cette hémorragie et de faire face à ce qui est décrit comme un "massacre industriel". Les salariés de Général Electric - Dji pour les intimes, - se sont sentis nargués et trahis par les responsables qui ont attendu l’après élection européennes pour annoncer leur plan de destruction d’un territoire. L'intersyndicale a rappelé les actions précédentes de blocage de réunions organisées par les dirigeants de l’entreprise, contraints de déplacer leur conciliabule à Paris…
De quoi motiver la détermination des salariés. Ils ne lâcheront rien.

Fred D Rico

 

 

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