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IDÉES ET HISTOIRE : Louise Michel, une artiste en Révolution



samedi 01 mars 2025

Le Journal de l'ins

oumission n°1794 mars 2025


IDÉES ET HISTOIRE : Louise Michel, une artiste en Révolution
Par William Foucaut

Louise Michel : un combat pour l’école


Louise Michel naît en Haute-Marne en 1830 d’une union hors mariage, probablement du fils d’un châtelain et d’une servante. Elle est élevée principalement par ses grands-parents paternels qui sont issus d’un milieu aisé et lui permettent d’acquérir une solide culture classique. Son premier engagement est celui pour l’école. Après son brevet d’institutrice, elle refuse de prêter serment envers Napoléon III en 1853. Ce geste ne lui permet pas d’enseigner au sein de l’Éducation nationale. Louise Michel va alors ouvrir des écoles plusieurs fois au cours de sa vie, ou bien enseigner dans des structures déjà existantes. Sa première école publique est mixte filles-garçons, ce qui est une innovation pour l’époque. Elle accueille les enfants de paysans pour 1 franc par mois. Elle va porter à l’école les combats anarchistes pour que les filles puissent accéder à l’éducation. Elle introduit des animaux, un jardin ou encore un petit musée dans sa classe. En 1857, elle part pour Paris. Son engagement pour l’école restera fort, pendant les premiers moments du siège de Paris par les Prussiens en 1870, elle crée une cantine pour ses élèves. Lors de sa déportation en Nouvelle-Calédonie,

elle enseigne aux enfants de déportés. Elle participe à une école libertaire à Londres en 1890. Par ailleurs, même dans les périodes où elle n’enseigne pas, elle continuera toute sa vie à donner des conférences.


Louise Michel, une militante politique révolutionnaire : « femme-projectile ».


L’engagement de Louise Michel est total pour la Révolution, elle s’oppose à l’idéal de femme-objet proposé par la société, elle propose celui de « femme-projectile » (Claude Rétat), totalement acquise à la Révolution, en première ligne. Dans la capitale, elle rencontre progressivement des responsables du mouvement socialiste et républicain notamment en participant à des cours du soir divers et variés. À la fin de l’Empire, elle intègre les courants révolutionnaires et soutient Auguste Blanqui dans sa stratégie socialiste révolutionnaire insurrectionnelle. À la fin des années 1860, elle aide les ouvrières à s’organiser et écrit dans des journaux d’opposition. Après la défaite du Second Empire contre la Prusse, elle est élue présidente du comité de vigilance des citoyennes du XVIIIe arrondissement de Paris. Dès janvier 1871, elle participe à l’action pour la création de la Commune révolutionnaire de Paris.
Elle fait partie de l’assaut sur l’hôtel de ville le 22 janvier réprimé par l’armée. En tant que garde nationale du 61ème bataillon de Montmartre (dit « bataillon des enfants perdus ») et blanquiste, elle devient ambulancière et anime un club révolutionnaire pendant la Commune. Elle participe aux barricades à Montrouge, Clamart et Neuilly. Louise Michel envisage de tuer elle-même Adolphe Thiers, homme fort du pouvoir contre-révolutionnaire pendant la Commune. Mais dans le même temps, sa mère est arrêtée pour faire pression sur elle. Louise Michel se rend et est enfermée.
Pendant son procès, suivant sa ligne, elle déclare, « je ne veux pas me défendre, je ne veux pas être défendue ; j’appartiens tout entière à la révolution sociale ». En réalité, elle enferme les juges dans un dilemme : le maintien de l’ordre établi suppose la condamnation à mort de Louise Michel mais la société genrée leur interdit de mettre à mort une femme. Louise Michel le sait et met les juges face à leur contradiction en demandant sa propre mort. Elle est finalement condamnée à la déportation en Nouvelle-Calédonie en 1873 et y reste jusqu’en 1880. Mais ce ne sont pas ses seuls engagements. Son engagement féministe est un fil rouge pendant sa vie, luttant pour l’« égalité des sexes » (terme de l’époque), qui serait
« une brèche dans la bêtise humaine » ou contre la prostitution vue comme du bétail humain pour les patrons. En 1886, elle soutient les mineurs aveyronais de Decazeville dans l’affaire Watrin. Le 22 janvier 1888, blessée par Pierre Lucas lors d’une conférence au Havre, avec une balle dans le crâne, elle témoigne pour qu’il n’aille pas en prison. Sur son lit de mort Pierre Lucas déclarera « que les anarchistes veillent sur ma fille ! ». Elle ne supporte pas l’idée d’être dépeinte en victime. Louise Michel lutte également pour les droits humains, notamment à travers son engagement maçonnique. Enfin, elle est un soutien de la cause animale en les considérant comme des êtres sensibles et victimes d’exploitation comme les humains entre eux dans La Cruauté contre les bêtes (1886).


Louise Michel : une artiste avant tout ?


Le grand combat de Louise Michel pour être considérée comme une artiste reste méconnu. Elle écrit : « Voyez-vous, au fond j’ai toujours été une artiste, je suis une artiste en révolution ». Elle considère ses Mémoires comme une œuvre et non seulement comme un récit historique. Son éditeur, de son vivant, tente de faire d’elle une figure révolutionnaire et combattante, cette image de « Vierge rouge » en proposant des modifications dans ses écrits. Louise Michel s’y oppose, elle voit dans l’écriture une forme d’étude psychologique. Elle désire faire œuvre sur elle-même et être prise comme telle, une artiste. Ainsi, dès les années 1850, elle écrira, en plus de son autobiographie, presque une trentaine d’ouvrages, recueils de poèmes, romans, etc. Elle entretient pendant 20 ans une correspondance avec Victor Hugo, qu’elle admire pour ses écrits. Enfin toute sa vie elle écrit dans la presse, sous le pseudonyme d’Enjolras.
Louise Michel décède en 1905 à Marseille d’une pneumonie probablement contractée lors d’une de ses conférences. 10 000 personnes l’attendent à son retour de Nouvelle-Calédonie, 120 000 personnes sont présentes à son enterrement, voilà qui témoigne de sa popularité déjà à l’époque. Aujourd’hui malgré les rues, les établissements et les récupérations politiques, ses combats restent plus que jamais d’actualité ! Nous commémorerons le 18 mars les 154 ans de la Commune, ses combattantes et ses combattants !

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